Famille Education

Droits de l'enfant ; Innocence ; Autorité ; Education ; Famille

Cette catégorie rassemble les enjeux liés aux perceptions de la famille et de son rôle dans l’éducation des enfants. Pour traiter de cette relation, il faut prendre en compte le fait que le modèle familial équilibré, stable et idéal, tout comme les modèles d’éducation, ne sont pas les mêmes selon les contextes culturels. La répartition des rôles quant à l’éducation des enfants est sujette à question.

Ces dimensions sont à prendre en compte au regard du travail social, car bon nombre de professionnel.le.s accompagnent des familles et peuvent se trouver confronter à des situations d’incompréhension face à des rapports familiaux ou éducatifs divers.

Un peu de contexte...

Aujourd’hui, dans la plupart des sociétés occidentales, l’éducation est souvent liée à la scolarisation. Selon la CIDE (Convention Internationale des Droits de l’Enfant), tout enfant (défini comme tout être humain âgé de moins de 18 ans), a le droit d’être protégé, nourri, soigné, éduqué, de s’exprimer, d’avoir des loisirs… En France, l’éducation est obligatoire jusqu’à 16 ans. Pourtant, l’idée que les enfants sont des êtres en développement qui méritent attention et soin (soit de la part de la famille soit de la part des institutions) est quelque chose de relativement récent dans notre histoire : à en juger par la parution même de la CIDE, datant de 1989 !

Des études comme celles de Norbert Elias montrent que la séparation entre les enfants et les adultes est relativement récente. Longtemps, les enfants ont été considérés comme des adultes en version miniature, ou des adultes inaccomplis. Et si les enfants continuent de disposer de peu de pouvoir face à leurs parents qui leur disent généralement quoi faire, quand le faire et comment le faire, ils se trouvent aujourd’hui bien souvent au centre des attentions au niveau familial et social.

Dans le contexte du travail social, des valeurs liées à l’éducation et au rôle des parents sont souvent mises en lumière : ce qu’un parent devrait faire, à quels besoins un parent devrait subvenir, comment garantir la protection des enfants, leur bien-être et leur innocence…

LES DIFFéRENTES REPRéSENTATIONS DE LA FAMILLE

Les représentations de ce qu’est la famille et des rôles qu’elle remplit sont différentes selon les contextes socioculturels, et les époques. Certaines familles ne se définissent que par des liens de parenté proches tandis que d’autres se définissent par des liens d’affection ou encore de responsabilité. Certains enfants sont élevés de manières collective dans plusieurs familles et d’autres sont élevés dans des cercles plus restreints.

Dans le monde coexistent de multiples types de structures familiales, avec chacune leur propre fonctionnement.

Nous pouvons citer, de façon non exhaustive :

  •  la famille nucléaire : l’enfant vit avec ses deux parents, mariés ou non, hétérosexuels ou homosexuels.
  • La famille élargie qui peut réunir plusieurs générations. C’est la coexistence dans le même foyer d’un ensemble assorti de plusieurs personnes.
  • la famille monoparentale : l’enfant vit avec son père ou sa mère
  • la famille recomposée : l’enfant vit avec sa mère, ou son père, et un beau- parent
  • la famille adoptive : l’enfant vit avec des parents non biologiques
  • la famille matriarcale : c’est une famille où la mère a eu plusieurs enfants, tous de pères différents.
  • la famille polygame

A noter que ces différentiations peuvent être pertinentes ou non selon les contextes culturels. Dans certains contextes, identifier une famille comme nucléaire ou élargie peut ne pas avoir de sens.

Au-delà des typologies, il est à noter que la famille assure diverses fonctions, dont :  la reproduction (qui est une des fonctions essentielles de la famille en permettant d’assurer sa descendance) ; la socialisation (la famille reste le lieu privilégié de la diffusion du langage et de la culture. Elle va préparer l’enfant à s’intégrer à la société, même si aujourd’hui crèches et écoles accompagnent l’éducation des parents) ; la solidarité (la famille reste un lieu de solidarité privilégié – logement, nourriture…) ; la transmission du patrimoine économique et familial (c’est au sein de la famille que se transmettent les biens familiaux (maison, meubles, héritages) qui constituent le patrimoine familial, la consommation et la production).

Toutes ces fonctions et leur degré d’importance varient selon les représentations de la famille et de ses devoirs vis-à-vis de ses membres.

DIFFéRENTES REPRéSENTATIONS DE L’éDUCATION

L’éducation a existé dans toutes les sociétés humaines et depuis toujours que ce soit dans une dimension formelle ou non formelle. Étymologiquement, éducation veut dire « guidée hors de » (du latin educere), c’est-à-dire développer, faire produire. Aujourd’hui, cela signifie plus couramment l’apprentissage et le développement des facultés intellectuelles, morales et physiques. L’éducation humaine inclut des compétences et des éléments culturels caractéristiques du lieu géographique et de la période historique. Dans ce sens, il semble important de mentionner que l’éducation est à présent plus fréquemment pensée en tant qu’outil d’insertion et de transition de l’enfance vers la vie adulte, et qu’elle est aussi le fruit du changement de perception envers les enfants.

Chaque pays dans le monde dispose de son propre système éducatif, et à l’intérieur même des pays il y a différentes façons de voir l’éducation.

Durkheim écrit au début du XXe siècle qu’il « est vain de croire que nous élevons nos enfants comme nous voulons », la génération des adultes étant contrainte de se conformer à des « types d’éducation » propres à sa société et à son époque afin que « la jeune génération » puisse s’y intégrer. L’éducation a donc lieu à travers la socialisation, que ce soit par la famille (socialisation primaire), ou bien l’école, les médias, les groupes d’appartenance, etc (socialisation secondaire).

On imagine souvent l’éducation comme étant le fruit de la scolarisation des enfants, alors que ce lien peut être remis en cause. Dans certains contextes culturels, un enfant qui ne va pas à l’école n’est pas forcément vu comme un enfant non éduqué.

Qu’est-ce qu’une « bonne éducation » ? Que sont de « bons parents » ?  

Education, Famille et Travail Social

Dans le travail social, nous sommes aujourd’hui confronté.e.s à une multiplicité de tâches qui font partie de l’accompagnement. La réalité du travail social excède la mission originalement confiée, par exemple la recherche d’un logement en sortie de CADA, et sollicite un suivi et un accompagnement plus profond touchant à plusieurs domaines annexes (la santé, l’éducation, l’intégration). L’accompagnement se passe avec la personne accompagnée mais aussi avec ses proches et son environnement. C’est donc dans cet espace là où la plupart des incidents critiques collectés se situent : entre la mission confiée, la vocation d’aider les autres, les moyens dont nous disposons et l’univers culturel de chaque usager.e.

Dans l’incident critique « Information préoccupante » une assistante sociale est choquée lors d’une visite à domicile par les propos tenus par une jeune maman concernant ses enfants : « je n’ai pas de problème. Si je le frappe c’est pour qu’il me respecte quand il sera plus grand. J’aime mes enfants, y’a pas de problème ». Les professionnel.le.s, dont le rôle n’est plus seulement d’accompagner, sont sensés détecter la souffrance de l’enfant ainsi que les carences éducatives des parents ; si l’enfant fait l’objet de maltraitance, les professionnel.le.s doivent le rapporter. Le dialogue avec les familles est toujours à privilégier et le bien-être de l’enfant, à considérer comme une priorité.

Souvent les travailleur.euse.s sociaux.ales se voient confronté.e.s à des scènes de violence concernant la parentalité et/ou l’éducation. Pour comprendre les liens complexes entre culture, punition parentale, violence et éducation, il nous faut remonter le temps et explorer deux paradigmes de l’éducation. Même si dans l’Europe actuelle, ne pas exercer sur les enfants de violences physiques constitue un principe fondamental, cela n’a pas toujours été le cas.

Un regard centré dans un contexte européen privilégiant la réalisation individuelle

On peut observer un changement de paradigme qui s’est déroulé au cours des cinquante dernières années : les études ayant pour objet l’enfant se sont multipliées et se sont intéressées à son développement physique et psychique. La biologie, la psychologie et la pédagogie (entre autres disciplines) ont ainsi influencé la fonction parentale et éducative, donnant naissance au nouveau paradigme. Cette vision nouvelle s’oppose à une autre, plus traditionnelle (encore présente à différents degrés dans plusieurs régions du monde), selon laquelle l’enfant, propriété des parents, est soumis à leur autorité absolue, pouvant se manifester par des corrections physiques, des châtiments corporels et toute autre punition.

Pour mieux mettre le doigt sur les divergences entre ces paradigmes, il convient de distinguer :

  • Education traditionnelle : Instruire et attribuer des tâches de contribution au foyer ; l’enfant est une entité annexe au parents ; les parents décident de ce qui est bon pour l’enfant ; asymétrie de pouvoir + La punition physique est permise et fait partie de l’éducation : c’est un outil majeur d’éducation des enfants.
  • Education libérale moderne : accorder à l’enfant intérêt, affection et stimulation ; l’enfant est une personne à part entière jouissant de ses propres droits ; les parents prennent en compte la volonté, désirs et opinions de l’enfant ; dialogue visant à faire comprendre les exigences à l’enfant + La punition physique disparaît (passibles de procédures judiciaires). On s’attache à réagir par des encouragements et à soutenir les points forts de l’enfant.

Même en faisait apparaître ces deux paradigmes, on observe néanmoins sur le terrain des zones d’ombres et des zones intermédiaires où les professionnel.le.s se sentent perdu.e.s. La narratrice de l’incident Information préoccupante dit « Celle-ci est très fâchée contre moi ne comprenant pas ce que j’ai fait alors qu’elle me dit aimer ses enfants (…) je me sens frustrée ». Nous avons remarqué des caractéristiques bien définies entre les paradigmes. Pourtant, les professionnel.le.s contemporains sont en peine quant à la posture à adopter face à ces manifestations de violence. Iels sont en quête de réponses et recherchent le plus souvent l’appui d’une autorité ou d’un.e collègue plus expérimenté.

Nous avons brièvement exposé, dans cette introduction, les effets de chaque paradigme afin d’aider les professionnel.le.s à se familiariser à une réflexion leur permettant de se garder de tout jugement prématuré et de toute action pouvant avoir des conséquences fâcheuses.Comme nous l’avons écrit dans l’introduction à la méthodologie, se décentrer permettra d’évaluer la situation tout en restant ouvert.e à plusieurs angles possibles d’interprétation d’une situation.

Les incidents

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